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Un ours peut en cacher un autre

L’ours a toujours été un animal attirant autant que terrifiant, selon les circonstances, un compagnon très particulier. Dans la vallée du Vallespir, en pays catalan, il a inspiré trois fêtes de village que l’Unesco a mis au patrimoine culturel immatériel de l’humanité.

Dominique Lajoux, ethnologue au CNRS et spécialiste des rythmes calendaires, a donné la dimension, non pas d’une légende mais d’une histoire vraie, qui a compté dans l’évolution du genre humain. Il existe toute une littérature scientifique sur cet ursidé qui fut l’objet de cultes, de vénérations bien avant que les religions ne s’implantent dans les différentes civilisations de l’hémisphère nord où il sévit et, qui sait, jusqu’en en Amérique du Sud, dans la cordillère des Andes, où vivent encore quelques ours noirs.

En Catalogne, Robert Bosch, agrégé de physique-chimie, a épousé la cause de la fête de l’ours dans la vallée du Vallespir. Il a travaillé à différencier les fantasmes et la coutume qui entourent le rapport à l’ours, au point d’intéresser l’Unesco qui, comme en Roumanie, a décidé de protéger les fêtes qui couronnent la créature.

L’ours, c’est la force

La vénération de l’animal n’est donc pas une spécificité pyrénéenne. Elle se révèle notamment en Roumanie, pays qui abrite plus de la moitié de la population européenne d'ours bruns, lors de la fête de Comanesti. Elle va même jusqu’au Japon où des sacrifices rituels d’ours ont eu lieu dans les montagnes.

Du monde amérindien au sibérien, elle s’adapte aux conditions de vie de chaque communauté qui puise sa force physique et morale dans son rapport avec un animal qui fut hier son concurrent. Dans ce contexte, les religions établies, quelles qu’elles soient, donc la chrétienne en occident, ont combattu cette croyance ancestrale avec véhémence. Elles ont presque réussi à tout effacer, mais la coutume a résisté dans plusieurs villages de montagnes, notamment dans les Pyrénées.

Parler ours, rien de plus facile

Le cri de l’ours, c’est « ORK » en catalan, en français et en basque, qu’on se le dise. Lorsque des jeunes gens s’emparent de l’apparence de l’ours, ils ne sont censés connaître que ce cri de ralliement qui rassemble beaucoup de monde, y compris l’hiver, dans les fêtes de village, entre la Méditerranée et l’Atlantique.

« La Fête de l’Ours d’Arles-sur-Tech, nous dit Robert Bosch, représente la rencontre légendaire de la Belle et de la Bête, en un scénario des plus primitifs. Un trappeur très réputé, venu du Canada,aide les villageois à se libérer du redoutable plantigrade. Sa compagne, Roseta, subit les assauts séducteurs de Martin et l’union qui se produit entre les deux créatures précède la métamorphose finale de l’Ours. Rasé à la hache, il retrouve alors l’humanité et signe le renouveau printanier. »On est loin du doudou des petits, certes, mais le village ne les a pas oubliés. Il a réservé, cette année, une journée entière pour les amuser dans un spectacle des plus adorables.

Plus tard, à la fête de Prats-de-Mollo, le 24 février, l’homme se transforme en ours pour redevenir homme après avoir attiré auprès de lui Roseta, au travers d’une course poursuite symbolique qui devient un jeu. La femme est tout d’abord maculée de suie huilée. Ensuite, « l’ours » lui jette un bout de bois dont on imagine le symbole sexuel, lui aussi imprégné, jusqu’à ce que la femme prenne en définitive le dessus obligeant l’ours à redevenir homme. Le barbier du village fait le reste.

Cerise sur le gâteau, dans la foulée, à Saint-Laurent-de-Cerdans, le 1er mars, les Figueretes, groupe de filles des trois villages, portent haut les couleurs de la femme et harcèlent l’assistance avec un mélange de figues et de muscat, dans un déroulement carnavalesque décoiffant.De quoi apporter un démenti spectaculaire aux rumeurs de machisme qui circulent parfois dans les grandes villes de la côte.

La coutume tient le coup

Cette fête traditionnelle en trois temps est souvent décriée à l’occasion de dérives qui n’ont rien à voir avec la tradition et dans lesquelles des femmes vont être bousculées à leurs dépens, faisant le festin de faits divers dans les journaux locaux. C’est pour cette raison, entre autres, que les trois villages du Vallespir font tout ce qu’ils peuvent pour empêcher que cette tradition soit dénaturée par un défoulement vulgaire ou par une démarche artificielle pour attirer les touristes.

« Le point de départ, c’est le jour de la chandeleur pour les chrétiens, de la chandelours pour les païens. Si la fête évolue avec les nouvelles générations, ce sera autre chose. En attendant, la tradition millénaire tient le coup et fait partie de l’héritage culturel d’une humanité qui n’est pas encore mangée par l’artificiel », a conclu Robert Bosch lors d’une conférence qu’il a tenue, le 2 février, pour les adhérents de LSR à la médiathèque de Céret.

Yvon Huet

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