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LA RAFLE DU VEL D’HIV, 80 ANS APRÈS

Les 16 et 17 juillet 1942, la police française arrêtait près de 13 000 juifs pour les livrer aux nazis, lors d’une gigantesque opération connue sous le nom de rafle du Vel d’Hiv. Une série documentaire, diffusée sur France Culture, revient sur l’événement. Elle donne la parole aux témoins et aux historiens. Édifiant !

« On nous a fait marcher comme un troupeau (…). Tout le long du chemin, les gens étaient massés aux fenêtres ou sur les trottoirs. Certains faisaient le signe de croix les larmes aux yeux, d’autres nous montraient du doigt en riant. » Rachel Jedinak a 8 ans quand elle se retrouve parquée avec sa sœur et sa mère à la Bellevilloise, servant de centre de regroupement du xxe arrondissement, avant l’envoi à Drancy ou au Vélodrome d’Hiver. Sa mère pour l’obliger à la lâcher et gagner l’issue de secours la gifle violemment. Elle réussit à s’enfuir avec sa sœur, alors que deux policiers en faction tournent la tête pour ne pas les voir sortir. Les récits des survivants, interrogés par Alain Lewkowicz pour la série documentaire, La rafle du Vel d’Hiv, récits d’un crime français, diffusée sur France Culture, nous plongent au plus près de l’événement. Annette Krajcer se souvient des milliers de femmes et d’enfants enfermés dans le Vélodrome plusieurs jours. Chaleur étouffante, cris, pleurs, elle nous raconte le brouhaha qui règne dans les gradins de ce lieu dédié aux courses cyclistes ou aux combats de boxe. Là, ce sont des familles, sans eau, sans nourriture, les latrines bouchées, qui tentent de dormir sur des strapontins. « Est-ce que maman va rester avec nous ? », la vieille dame redevient une petite fille quand elle rapporte les questions qui la taraudent alors.

Un crime organisé

Point d’orgue de la collaboration des autorités françaises avec les nazis, la rafle du Vel d’Hiv’, négociée par René Bousquet pour qu’elle soit orchestrée par la police française, suit une logistique impitoyable. Il s’agit de livrer aux Allemands un maximum de juifs étrangers ou apatrides, voués aux camps de la mort. Les historiens Olivier Wieviorka et Jean-Marc Berlière nous livrent les coulisses de l’opération. André Tulard, haut fonctionnaire, s’est chargé dès octobre 1940, d’élaborer un fichier où les juifs sont classés par nom, adresse, profession et nationalité pour mieux les trouver. Il table sur 22 000 arrestations. Pierre Laval, chef du gouvernement de Vichy, y associe les enfants, non demandés par l’occupant. Les circulaires précisent le déroulement de l’effroyable opération : les lieux de rassemblement par arrondissement, les profils des victimes, le nombre d’autobus à réquisitionner, les 9 000 policiers à mobiliser… Une note classée secrète rappelle les consignes : « Lorsque vous aurez un contingent suffisant pour remplir un autobus, vous dirigerez sur le camp de Drancy les individus ou familles n’ayant pas d’enfants de moins de 16 ans et sur le Vélodrome d’Hiver, tous les autres. »

Une France tiraillée

On suit le périple des enfants qui ont survécu et ça prend aux tripes, alors que les musiques yiddish résonnent. On s’interroge sur l’attitude des Français : les concierges qui dénoncent ou qui planquent, les nourrices parfois maltraitantes, les policiers qui font du zèle, d’autres non… Prévue le 13 juillet, la rafle commencera trois jours plus tard, le premier jour des vacances scolaires. Sur les 22 000 juifs escomptés, environ 13 000 seront livrés. La rumeur a circulé, certains ont pu se cacher. Les historiens Jacques Sémelin ou Serge Klarsfeld rappellent les gestes d’entraide qui se mettent spontanément en place, la résistance des juifs qui s’organise*. La série explore toutes les facettes de l’événement jusqu’à son héritage, intime comme politique. « Tu as de la chance d’être restée en vie alors tais-toi ! », s’entend dire Rachel Jedinak du haut de ses dix ans.

À la Libération, de Gaulle entend restaurer la concorde, la rafle semble oubliée. Des années plus tard, François Mitterrand refuse de reconnaître la responsabilité de la France. Il faudra attendre le 16 juillet 1995 pour que Jacques Chirac prononce un discours sans équivoque : « La France, patrie des Lumières et des Droits de l'Homme, terre d'accueil et d'asile, la France, ce jour-là, accomplissait l'irréparable. Manquant à sa parole, elle livrait ses protégés à leurs bourreaux. »

Aujourd’hui, 80 ans après, le Mémorial de la Shoah est à la recherche des derniers témoins (www.memorialdelashoah.org/), alors que la rafle du Vel d’Hiv fait de nouveau débat en pleine campagne électorale. La rafle du Vel d’Hiv, récits d’un crime français, remarquable série radiophonique, fait toute la lumière sur l’événement comme une réponse implacable à ceux qui veulent falsifier l’histoire.

Amélie Meffre

 

Cabu dessins de la rafle du Vel d’Hiv
En 1967, Cabu illustre, pour Le Nouveau Candide, les textes de C. Lévy et P. Tillard sur la Rafle du Vel d’Hiv. À l’occasion des 80 ans de la rafle, Véronique Cabut, épouse du dessinateur décédé le 7 janvier 2015 dans les locaux de Charlie-Hebdo, et le Mémorial de la Shoah exposent les dessins pour la première fois depuis leur parution. Un double hommage à ne pas manquer.

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