Le transfert au Panthéon est devenu un acte présidentiel incontournable, depuis les années 1980, avec son lot de controverses comme celle suscitée par l’entrée de Gisèle Halimi. Retour sur un rituel républicain réinvesti.
À l’instar de la monarchie et sa basilique Saint-Denis où reposent les rois, la France révolutionnaire veut honorer ses héros. C'est en avril 1791, à la mort de Mirabeau, que l'Assemblée constituante décide de concrétiser le culte rendu aux grands hommes en transformant l'église Sainte-Geneviève en un panthéon laïc. Il faudra quasiment un siècle pour y parvenir.
Mirabeau, premier à entrer au Panthéon, en 1791, en est chassé le jour où Marat y fait son entrée en 1794, avant de connaître le même sort peu de temps après… Par un décret de 1806, Napoléon 1er rend le lieu au culte catholique, tout en conservant la crypte pour la panthéonisation de ses dévoués serviteurs. Sous la Restauration, par un décret de 1821, Louis XVIII rend le lieu exclusivement au culte religieux. En 1830, le temple laïque renaît, puis disparaît de nouveau après le coup d'État de 1848.
Il faudra attendre les funérailles grandioses de Victor Hugo, en 1885, pour que le monument perde définitivement sa vocation religieuse. L'inscription « Aux grands hommes, la patrie reconnaissante » est remise sur le fronton. Depuis, les panthéonisations se sont succédé. Certaines conflictuelles, comme celle de Jean Jaurès, en 1924, avec trois cortèges distincts. D'autres résonnent encore, comme celle de Jean Moulin, en 1964, avec le discours fleuve d'André Malraux. Aucune panthéonisation n'aura lieu entre 1964 et 1987.
François Mitterrand remet le Panthéon à l'honneur en décidant de sept entrées durant ses deux mandats, dont celle de Marie Curie, en 1995, première femme à y entrer pour ses mérites. René Cassin est panthéonisé, en 1987, en tant que père de la Déclaration universelle des droits de l'homme, Jean Monnet, l'année suivante, comme celui de l'idée européenne.
Depuis, le Panthéon est devenu un lieu hautement convoité et les pétitions se multiplient pour appuyer telle ou telle figure : Olympe de Gouges, Louise Michel, Marc Bloch, l'abbé Pierre… Sous Emmanuel Macron, si l’entrée de Simone Veil, en 2018, ne fit pas débat, ce n’est pas le cas de Gisèle Halimi. Son transfert au Panthéon, préconisé par le rapport de Benjamin Stora, pour pacifier les mémoires sur la guerre d’Algérie, n’est toujours pas acté. Son combat anticolonialiste fait toujours des remous, notamment chez les descendants de Harkis. La Patrie peine dans ses reconnaissances…
Amélie Meffre
À VOIR
Exposition Victor Hugo, la liberté au Panthéon, jusqu’au 26 septembre 2021. www.paris-pantheon.fr
À LIRE
Le Panthéon d'Anne Muratori-Philip, éd. du Patrimoine, 2010 et Naissance du Panthéon. Essai sur le culte des grands hommes, de Jean-Claude Bonnet, éd. Fayard, 1998.
La vie de Madeleine Riffaud est un hommage à la résistance sous toutes ses formes et en toutes circonstances. Le 2ème tome de ses mémoires en images est paru ! Editions Dupuis