Un Carré de Dames qui nous confirme une chose au demeurant banale, chanson et musique sont féminines.  Mille couleurs. Un arc-en-cieux aurait écrit Leprest.

Ne pensez pas qu’il faille simplement additionner quatre talents pour produire un album d’exception. Il faut savoir mêler les voix en harmonie, dans le respect des mots de l’autre. Il faut pouvoir atteindre ce tumultueux mélange des répertoires emporté par deux divas du clavier, la Nathalie et la Dorothée.

Ce n’est pas du savoir-faire, c’est du savoir écrire et chanter, du savoir jouer

Tout l’art de la chanson est là dans cet album unique, tour à tour drôle, grave ou extravagant. On y retrouve tout ce qu’on aime chez Anne Sylvestre et Agnès Bihl, une belle connivence et une parenté d’écriture : la colère, les petits ratés de la vie, les mecs qui finissent par vous débecter, l’enfance massacrée un peu partout dans ce monde qui ressemble à un « cauchemar attardé de Goya » (Aragon) et cette infinie tendresse pour les gens de peu, les déclassés de la vie : J’aime les gens qui doutent/Les gens qui trop écoutent/Leur coeur se balancer/ (Anne Sylvestre).

Résumons : Quatre dames, quatre as de l’écriture en page et en partition, quatre rebelles, deux pianos, quatre mains, quatre voix, dix-sept chansons d’antho¬logie. C’est tendre, exaspéré, révolté, jubilatoire. Une oeuvre militante pour le mot, la rime et la mélodie. Une écriture et un accompagnement musical éclatants. Allez, installons-nous…

Richard Vaillant

CD, Carré de dames, Anne Sylvestre, Agnès Bihl, Nathalie Miravette, Dorothée Daniel, 2015, Banco Musique, 12 €.