« Que je t’aime… Quand tes cheveux s’étalent Comme un soleil d’été Et que ton oreiller Ressemble aux champs de blé… Quand mon corps sur ton corps Lourd comme un cheval mort Ne sait pas, ne sait plus S'il existe encore… Quand on a fait l'amour Comme d'autres font la guerre. Quand c'est moi le soldat Qui meurt et qui la perd… Que je t’aime. »
Johnny Halliday, l’enfant mal aimé aura donné à des millions de français, et sur plusieurs générations, le goût d’une vie où « s’envoyer en l’air » au sens propre comme au sens figuré doit être compris comme un grand saut vers le bonheur qu’on peut chanter à l’unisson sans retenue. Sa vocation s’est révélée dès sa petite enfance, dans un monde où le spectacle et les tournées l’ont préparé à ce qu’il deviendra très vite, un chanteur de rock à l’image de son mentor, Elvis Presley, adulé par un public fidèle et toujours grandissant. D’autres chanteurs l’ont inspiré dont Jimy Hendrix et, chez nous, Jacques Brel, qu’il admirait et considérait comme « un rockeur malgré lui. »
Il a su donner de la voix, du rythme, du mouvement et de la mise en scène, en jouant d’une bonne intuition à renouveler des paroliers tels que Michel Mallory, Charles Aznavour, Mathieu Chedid, Jean-Jacques Debout, Gilles Thibaut, Philippe Labro, Michel Berger et Jean-Jacques Goldman. Il aura su aussi s’adapter aux évolutions de la société sans pour autant se fondre dans une mode en soi.
Il forgea son aura dans la période qui précéda 1968, pendant laquelle il bouscula la rigidité d’une société que l’ont pourrait dire aujourd’hui « coincée ». Mais il n’a pas été seul dans ce souffle de l’histoire. Les Chaussettes noires, avec son ami de toujours Eddy Mitchell, et quelques autres galvanisaient la jeunesse dite du « baby boum », notamment au Golf Drouot avec les « Aristocrates », les « Pingoins » ainsi que « Dani Logan et les Pirates ».
Elsa Triolet avait remarqué ce jeune homme dont elle avait compris l’extraordinaire potentialité d’artiste hors norme. L’histoire aura confirmé son intuition. Il aura même été remarqué, grâce à Nathalie Baye, par Jean Claude Godard, son antipode, qui le fit jouer dans son film « Détective ». Certes, d’autres chanteurs, poètes et interprètes, qui expriment les valeurs universelles de la fraternité mériteraient le même hommage, voire plus qui sait, mais cela ne peut remettre en cause la place qu’il prend dans le cœur d’un peuple.
Certes, Johnny n’était pas un enfant de cœur, loin s’en faut. Sa vie privée, livrée en pâture à la presse dite « people », a été chaotique et il se coula, comme beaucoup d’autres, dans le moule de tout ce qui fait la règle du show business, jusqu’à l’exil en Belgique pour fuir le fisc. Mais cela ne l’empêche pas, désormais, quelles que soient les récupérations politiciennes de sa disparition, de mériter d’être en bonne place dans notre patrimoine culturel populaire.
Yvon Huet
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