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Repères › Economie du vieillissement

L'HOMME QUI VEUT DRESSER LES JEUNES CONTRE LES VIEUX

En France, la pension nette moyenne des retraités était de 1 341 € en 2020 et elle a moins augmenté que l’inflation depuis. Néanmoins, François de Closets, un ancien journaliste né en 1933, accuse les natifs de l’après Seconde Guerre mondiale d’être trop nombreux et responsables de la précarité des moins de 30 ans !

À  la Une de L’Express du 19 au 25 mai, on lisait : « Les boomers ont-ils ruiné la France ? ». C’était pour vendre le livre La parenthèse des Boomers que François de Closets vient de publier chez Fayard. Le terme boomers sert à désigner les natifs des années de l’après Seconde Guerre mondiale, lesquelles furent marquées par la croissance économique des Trente Glorieuses jusqu’au milieu des années 1970. Répondant à une première question, de Closets justifiait sa charge contre cette génération en évoquant le taux d’endettement de la France égal à 115 % du Produit intérieur brut (PIB) pour affirmer : « Nous avons détruit l’héritage de nos enfants et petits-enfants, en s’en fichant royalement. J’ai alors réalisé qu’il ne s’agissait pas d’un problème de gauche ou de droite, mais de génération ». Mais il occultait le fait que ce taux d’endettement a grimpé de 20 points depuis le début de la pandémie de Covid-19.

Boomers responsables

En deuxième question, il lui était demandé s’il n’attribuait pas « trop de responsabilité à cette génération dans le déclin français ? ». De Closets affirmait que « les boomers ont hérité de la France dans le contexte d’une parenthèse enchantée », en référence à la croissance économique de cette période. Mais ces boomers et leurs aînés furent nombreux sur les chaînes de production aux cadences infernales pour faire croître les profits et les dividendes. À partir des années 1980, les délocalisations de productions ont fait croître le chômage et la précarité en France. Occultant ce long processus, François de Closets raisonnait sur 2021 pour affirmer que « le déficit de notre balance commerciale atteint le total monstrueux de 100 milliards de dollars ». « La France ne sait même plus produire », ajoutait-il, en mentant par omission.

Dans cet entretien, il ne fut jamais question des retraites chapeau des PDG et autres hauts dirigeants ni des bonus ni du salaire variable en plus d’un fixe très élevé, pas plus que des actions gratuites liées aux résultats financiers. Dès lors, François de Closets pouvait affirmer que les responsables du déclin de la France, comme des inégalités de revenus, sont toujours les boomers en ces termes : « Dans les trois-quarts des cas, les retraités sont propriétaires, ce qui fait qu’ils n’ont pas de loyer à payer. Ils ont beaucoup plus d’épargne que les actifs (…). Il y a donc un transfert de la richesse vers les plus âgés. Il y a trois fois plus de pauvres chez les moins de 30 ans que chez les plus de 70 ans ». Mais nous savons par expérience que les retraités devenus propriétaires de leur logement se sont endettés durant de longues années pour rembourser leur emprunt à des époques où les taux d’intérêts s’élevaient parfois jusqu’à 16 %, comme en 1984-1985, avant d’être renégociés à la baisse, tout en restant au-dessus de 10 % pendant des années.

Accepter une retraite réduite

Pour justifier le recul de l’âge de départ en retraite dès cette année, François de Closets avançe cette vision simplifiée : « selon mes propositions, il faut que les gens aient le choix, attendre la retraite à taux plein à 67 ans ou partir à la retraite à 60 ans. Ces derniers devront accepter une retraite réduite ».
Comme il est né en 1933, cet homme a vu la pension de base que lui verse la Cnav calculée sur les 10 meilleures années de sa carrière. Avec la réforme Balladur de 1993, celle des natifs de 1934 fut calculée sur les 11 meilleures années, celle des natifs de 1944 sur les 21 meilleures années, celle des natifs de 1948 et après sur les 25 meilleurs années. Parallèlement, on passait de 150 à 160 trimestres validés pour bénéficier d’un taux plein. L’évolution des pensions fut calculée sur l’inflation mesurée par l’Insee et déconnectée de l’évolution du salaire moyen. Des augmentations de la CSG sont ensuite venues réduire encore le pouvoir d’achat des retraités, au point que l’équivalent d’un mois de pension sur douze a été perdu entre 2014 et 2021.

Travailler gratuitement

Nous sommes dans un pays où le taux d’emploi des 55 à 64 ans était de 56 % en 2021 car beaucoup ont été licenciés, dans cette tranche d’âge, et n’arrivent plus à se faire embaucher. De Closets propose de les faire travailler gratuitement en ces termes : « c’est aux seniors de prendre en charge pour l’essentiel les vieillards. Car nous ne trouverons pas suffisamment de personnes pour s’occuper de nos personnes âgées de façon professionnelle : la famille n’est plus capable de le faire tant elle est éclatée, et nous manquons d’argent et de main-d’œuvre. Ces métiers n’attirent pas. »
Il est vrai qu’ils sont mal payés. En témoigne le scandale Orpea non évoqué dans cet entretien.

Gérard Le Puill
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