De Santiago du Chili à Quito, de Bagdad à Beyrouth en passant par Paris et de nombreuses capitales européennes,la contestation des politiques ultralibérales prend une ampleur inégalée.
Souvenez-vous. C’était dans les années 1980, lorsque le libéralisme s’étalait en une glu indécrottable, vanté sous toutes les latitudes et sous toutes les formes. À la télévision serpillère, l’émission à grand spectacle « Vive la crise » ratissait largement artistes, sportifs, journalistes, syndicalistes (sauf la Cgt), commentateurs. Les « stars » de l’époque. La presse, en France et dans le monde, dans sa presque totalité, regorgeait de commentaires, tribunes et éditoriaux mielleux à la sauce Reagan/Thatcher répandant l’idée dominante selon laquelle la solution à tous les maux passait par les « gagneurs », la compétition, les restructurations, le gain, le fric. Le château de cartes à l’Est de l’Europe s’effondrant, toutes les portes s’ouvraientau capitalisme triomphant sur les ruines d’un socialisme agonisant, quitte à s’essuyer des deux pieds sur les plus fragiles de la planète.
Sauf que. Nous voici en 2019. Comme une horloge gênant le silence en rappelant incessamment sa présence, le temps a sonné des années d’étranglement et de paupérisation des populations, d’éruption d’élites arrogantes et corrompues, de pouvoirs ligotés aux puissances de l’argent, d’un monde médiatique asservi et de plus en plus vomi à qui on a envie de dire : « essuyez vos bouches, il reste encore quelques mensonges sur vos bouches. »
Sauf que. Le monde bouge. Les peuples ne supportent plus ces politiques qui les enferment dans la précarité face au déferlement des richesses réservées à une minorité. De Santiago du Chili à Quito, de Bagdad à Beyrouth, de Paris à Madrid, un même vautour prédateur est désigné: l’ultralibéralisme.
Sauf que. Le mouvement enclenché pour plus de justice sociale, pour une juste répartition des richesses, pour plus de démocratie et de transparence, contre la dictature de l’argent n’est pas près de s’éteindre. Le feu brûle, il va s’étendre.
Sauf que. Les chefs du vieux monde capitaliste et leurs patrons souvent véreux des places boursières auront beau faire, tenir des discours conçus benoîtement comme apaisants, coller quelques sparadraps sur des blessures sociales profondes, brandir un jour le chantage, l’autre la menace répressive, ils ne pourront plus contenir la colère populaire.
Il n’y a rien d’autre au bout du chemin de la lutte que le bout du chemin. Seul le parcours compte et la manière de l’emprunter. Dans le monde entier, l’action contre l’ultralibéralisme adopte des formes diverses. Dans les bureaux de vote victorieux comme en Argentine et en Bolivie provoquant la haine des droites fascisantes, dans les rues de Santiago du Chili et Quito et dans bien d’autres villes du monde. Un mouvement irréversible.
Sauf que rien ne s’obtient sans lutte. Et l’on connaît ici et ailleurs le degré de servilité de ceux qui font preuve d’un suivisme sans limite. Souvent, les mêmes se métamorphosent, se recroquevillent, courbent le dos et s’approchant du puissant disent à voix basse mais de façon à être entendus : « Dites-moi ce que je dois faire, je suis à vos ordres. »
Sauf que. Ces gens là ne font plus la pluie et le beau temps. Un rouleau compresseur populaire est en marche.
José Fort
Après une semaine de violences inouïes, le président Evo Morales (aujourd’hui réfugié au Mexique) a démissionné afin d’éviter « le bain de sang ». Élus battus, humiliés, villages indigènes brûlés, incendies des domiciles de Morales et de ses proches, la chasse à l’homme a pris des dimensions rappelant les pires moments de ce pays et de l’Amérique latine. Il s’agit là d’un coup d’État soigneusement concocté par la droite bolivienne et les États-Unis sous les applaudissements de Donald Trump.
Le prétexte ? Le refus d’accepter le résultat des élections qui avait donné Evo Morales vainqueur, dès le premier tour, grâce aux voix indigènes des zones rurales. Un résultat insupportable pour les riches blancs des villes rejoints par une partie des couches populaires sorties de la pauvreté grâce à la politique sociale du pouvoir en place.
Avec en toile de fond, la plus grande réserve de lithium, l’or blanc de la Bolivie convoité par les multinationales et l’impérialisme yankee.
Les événements en Bolivie ne peuvent estomper les récentes grandes victoires en Amérique latine comme la libération de Lula au Brésil, l’élection salvatrice en Argentine, le fantastique mouvement social au Chili. Qu’on ne s’y trompe pas : la résistance a commencé en Bolivie.
J.F.
La vie de Madeleine Riffaud est un hommage à la résistance sous toutes ses formes et en toutes circonstances. Le 2ème tome de ses mémoires en images est paru ! Editions Dupuis