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Numérique. Quand progrès rime avec précarisation

Les avantages techniques et les gains de productivité permettent l’introduction du numérique dans les processus de production et les activités économiques en général. Regardons comment le système capitaliste l’utilise pour surexploiter les individus dans le seul but d’accroître les profits. Exemples.

L’arnaque de Take Eat Easy

Take Eat Easy était une plate-forme numérique créée à Bruxelles. Elle faisait travailler des coursiers à vélo dans 20 grandes villes européennes dont plusieurs en France comme livreurs de repas à domicile. En 2015, elle avait réussi à lever 16 millions d’euros en deux fois pour se développer. En 2016, le nombre de ses clients étant passé de 30 000 à 350 000, elle voulait lever 30 millions d’euros de plus pour son développement. Sauf qu’aucun investisseur n’a voulu suivre.

Donc, la société a rallongé ses délais de paiement aux restaurateurs et aux auto-entrepreneurs livreurs. Lesquels étaient sélectionnés en fonction de leur notation par les clients. Puis, il y eut un redressement judiciaire le 26 juillet dernier, ce qui a entraîné une cessation d’activité en août. Ainsi, les prestataires n’ont pas été payés pour leur dernier mois de travail voire au-delà. Certains livreurs ont perdu de 2 à 4 000 € et certains restaurateurs plus de 10 000 € pour des repas que les clients ont consommés et payés à Take Eat Easy. Mais qu’ont fait le fondateur et ses associés des sommes versées par les investisseurs et les clients ?

Il serait donc possible de ramasser un pactole en montant cette nouvelle forme d’entreprise dont le fonctionnement n’est guère coûteux. L’argent dépensé sert surtout à se faire connaître pour tenter de grandir face à la concurrence en surexploitant des auto-entrepreneurs.

 440 € par mois en moyenne

La France compterait aujourd’hui 1,1 million d’auto-entrepreneurs. En 2013, leur revenu moyen mensuel était de 440 € quand ils n’avaient pas d’activité salariée à côté. Certains exerçaient un autre métier ou poursuivaient leurs études tout en étant livreurs le soir.
Souvent, avec un si faible revenu, on ne cotise guère pour la retraite et la Sécu.

Mais heureusement, on peut bénéficier en France de la Couverture maladie universelle (CMU) quand on a besoin de se soigner. On a parfois l’Aide personnalisé au logement (APL) quand on a du mal à payer son loyer. On peut enfin améliorer son misérable budget grâce au Revenu de solidarité active (RSA). Sauf que toutes ces aides sociales sont financées par les impôts directs et indirects.

Donc, plus le nombre d’auto-entrepreneurs précaires soumis aux dictats des plates-formes augmente, plus les caisses dédiées à la protection sociale se vident. Ceci en enrichissants les donneurs d’ordres qui prélèvent une forte dîme sur les activités de chaque exploité.

La mise en relation ne crée pas de richesse

L’e-commerce n’arrête pas d’innover, mais souvent dans le plus mauvais sens du terme. Nous avons le « drive » qui permet de commander ses courses par internet avant d’aller les récupérer aux portes des magasins. Mais il est dépassé par la livraison à domicile ultrarapide d’Amazon et quelques autres. Amazon veut quadriller Paris et sa banlieue avec 18 000 produits référencés dans un entrepôt de 4 000 m2 créé à cet effet dans le XVIIIe arrondissement. D’ailleurs, la mairie de Paris s’inquiète de ce développement anarchique des livraisons à domicile, préjudiciable aux commerces de quartier.

Le nombre de coursiers soumis à la dictature des plates-formes ne cesse d’augmenter. En 2014, ils gagnaient 32 € de moins par mois qu’en 2013, selon une étude de l’Insee. Voilà comment vivent les nouveaux esclaves. Dans Le Monde du 19 juin, l’un d’eux disait : « Cela me fait un petit Smic en roulant entre quatre à huit heures par jour, 6 jours par semaine ». De son côté, un exploiteur confiait : « Nous avons ouvert de nouveaux créneaux horaires à disposition des livreurs. Nous recevons un maximum de commandes quand personne ne souhaite vraiment sortir. Quand il pleut, le samedi soir ou lorsque l’équipe de France de football joue… ».

Sélection au mérite

Qu’il s’agisse des conducteurs de voitures particulières ou des cyclistes livreurs de repas, la plate-forme exploitante demande à ses clients de noter l’esclave mis à son service sur la qualité de sa prestation afin de sélectionner les meilleurs et évaluer la rémunération. Cela augmente encore le degré d’exploitation.

Jadis, les gens de maison n’étaient guère payés. Mais ils étaient nourris, logés et blanchis… Aujourd’hui, ces auto-entrepreneurs remplissent un peu la même fonction pour permettre à certains citoyens de bénéficier de services à domicile. Mais ils sont moins bien traités que les serviteurs d’antan. Leurs conditions de vie et de travail résultent du nouveau rapport de classe dont ils sont victimes.

Et comme le principal objectif de la Loi El khomri est aussi d’accentuer ce processus de précarisation du travail, n’oublions pas que la lutte continue partout où elle tente de s'appliquer.

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