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RC Louvre, foot sentimental

Echarpes tricotées main, vieux maillots, billets jaunis et casques de mineurs peints en sang et or… Jusqu’au 7 novembre 2016, les couleurs du RC Lens, le célèbre club de football du Pas-de-Calais s’exposent dans l’antenne lensoise du musée du Louvre.

Pour arriver aux trois salles pavoisées de rouge et jaune de l’exposition gratuite RC Louvre, Mémoires Sang et Or, il faut d’abord traverser la Galerie du temps, l’immense espace immaculé du musée lensois qui abrite une promenade silencieuse (et gratuite elle aussi) entre momies millénaires, statues antiques, bas-reliefs médiévaux ou toiles de la Renaissance que les nombreux élèves en visite scolaire ne parviennent pas à troubler.

« C’est quoi ce bruit ? », chuchote soudain une jeune femme devant un Rembrandt. Au loin, s’élève un murmure. Il faut franchir le portail rouge et jaune qui marque le début de l’exposition consacrée au club de football lensois pour comprendre. Au milieu des maillots, des feuilles de matches jaunies, des sièges de stade vintage ou des cartes Panini à la gloire des anciens joueurs, un haut-parleur déverse la clameur des supporters entonnant en choeur Les Corons de Pierre Bachelet.
L’hymne officieux du Racing Club de Lens - qui ponctue la mi-temps des rencontres au mythique Stade Bollaert - berce ici les déambulations du visiteur parmi la petite centaine d’objets de l’exposition.

Objets fétiches

Leur particularité ? Ils n’ont pas été prêtés par des musées mais par des collectionneurs privés d’un jour : les supporters eux-mêmes.
« C’est sûrement la plus grande originalité de l’exposition », s’enthousiasme Fabien Dufoulon, responsable du centre de ressources du Louvre-Lens. Sculptures aux allures d’icônes cycladiques peintes aux couleurs du club ou désuet ballon publicitaire glané lors d’un match contre Anderlecht de 1983 (une rencontre devenue mythique pour un caillou soi-disant lancé des tribunes qui aurait dévié la balle et permis à Lens d’égaliser) : tous les objets proviennent d’une collecte entamée à l’été 2015. « Nous voulions que ces supporters, connus pour leur ferveur, soient acteurs. Nous leur avons demandé de venir nous présenter leur objet fétiche. Ce sont eux qui ont choisi le contenu de l’exposition RC Louvre », résume Fabien Dufoulon.

De la mine au stade

Bibelots, vieilles coupes ou trompettes s’accompagnent d’une vidéo où hommes et femmes de tout âge racontent la provenance de l’objet qu’ils offrent à la vue du visiteur. Ces témoignages dessinent certes l’histoire d’un des plus vieux clubs de France, mais ils esquissent surtout par petites touches un portrait intime et sentimental des supporters lensois.

Avec des mots simples, leurs témoignages évoquent les liens qui les unissent à leur stade, leur ville et à un club pas comme les autres. Créé en 1906 par la Compagnie des mines, le club qui a longtemps recruté parmi les Gueules noires reste très lié au passé ouvrier de la ville. En témoigne aujourd’hui le maillot des Sang et or qui arbore toujours fièrement sa lampe de mineur, ou ce casque — un de ceux que portaient les hommes pour descendre au fond — tout de rouge et jaune décoré, qui s’expose aujourd’hui dans ce musée érigé en 2012 sur une ancienne fosse.

Du terrain à l’expo

Les supporters ne sont pas les seuls à avoir investi les locaux vitrés logés à mi-chemin entre le stade et les terrils. D’anciennes gloires, comme Tony Vairelles, les frères Lech ou Eric Sikora que l’on redécouvre sur des vignettes autocollantes soigneusement conservées, ont prêté leur voix et leurs objets au musée. Daniel Leclercq, l’ancien joueur et entraîneur surnommé « le druide » parle de son grimoire, ce classeur ouvert sur une page manuscrite où sont consignées toutes les feuilles de matches, les blessures, les fi ches techniques et les remarques d’une saison 1998 qui mena les Lensois à la tête du championnat de France.

Histoire de famille

Ce portrait coloré et émouvant constitue aussi un éloge de la famille et de la t r a n s m i s s i o n dans une ville où les moyens m a n q u a i e n t souvent. « Les témoignages et les objets évoquent beaucoup l’enfance, le stade comme rite initiatique, les parents, les grands-parents, ou les premiers matchs entre copains », détaille Fabien Dufoulon.

Nicolas Zalewski a prêté au musée un petit tabouret fabriqué par son grand-père où sont maladroitement gravées les lettres RCL. Trop petit pour suivre le match depuis les tribunes, « j’étais toujours sur la pointe des pieds, se souvient-il. Mon grand-père, mineur de fond d’origine polonaise a pris quatre planches et on l’a fabriqué ensemble. Il n’est pas très beau mais il me rappelle mon grand-père. Il a une valeur autant sentimentale que sportive. »

Devant l’écharpe à grosses mailles rouges et jaunes tricotées par une grand-mère ou le meuble de télévision transformé par Yvette en vitrine presque religieuse à la gloire de son équipe, et que l’octogénaire illumine pour toute sa famille rassemblée les soirs de matchs, on sent poindre la nostalgie d’une époque : celle d’avant l’argent roi. Ici, pas d’objets standardisés vendus à prix d’or, mais des maillots hétéroclites, des mascottes et banderoles fabriquées à la main que l’on se transmet de génération en génération pour assister aux matchs.

Ces souvenirs vivront au musée

Classeurs, lettres, photographies, cassettes VHS et fanions élimés rappellent aussi un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître : celui d’avant Internet. « Par le passé, les fans avaient souvent la démarche méticuleuse des archivistes voire des conservateurs de musée », note le responsable du centre de ressources devant des cahiers d’écoliers remplis de coupures de presse, de résultats et de photos cerclées de rouge et jaune. « Cette pratique a tendance à disparaître. »

Inaugurée à l’occasion de l’Euro de football 2016 dont la capitale du bassin minier a accueilli quatre matchs, RC Louvre, Mémoires Sang et Or joue les prolongations jusqu’au 7 novembre. Et les objets, que deviendront-ils ? Tous ne retourneront pas aux vestiaires. Un quart partira à Nice au musée du sport. Comme cette licence jaunie de joueur de l’équipe junior de 1958 qu’Alfred Flambry, devenu fervent supporter, a conservée sur lui des décennies durant. « Le club, c’est ma vie. Il y a ma femme, et après ça. C’est ma vie », résume-t-il ému près de 60 ans plus tard, maillot sur les épaules et écusson sur le coeur. Son témoignage, comme tous les autres, sera versé aux collections immatérielles du Louvre.

« Ces morceaux d’histoires familiales, ces souvenirs simples ont acquis le même statut juridique que la Joconde », sourit Fabien Dufoulon qui rappelle que la devise du club et de la ville de Lens n’est autre que : « Fiers d’être Lensois ».


Camille Drouet

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