Les syndicats, singulièrement la Cgt, constituent un obstacle majeur aux politiques d’austérité. La répression envers les militants s’amplifie. La réponse de la CGT : rassembler autour des revndications actifs et retraités. Entretien avec le Secrétaire général de l’UCR-CGT.
Le quinquennat qui s’achève aura été marqué par une aggravation de la répression envers les militants de la Cgt. Pourquoi une telle situation ?
François Thiéry Cherrier : « Lorsqu’on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage » dit l’adage. Dans sa volonté d’imposer ses choix économiques au moyen de politiques autoritaires, le gouvernement a fait de la Cgt sa cible principale. Il ne supporte plus l’action revendicative, quelle que soit la forme qu’elle prend. Alors il réprime. On l’a vu notamment avec la loi El Komeri : 49-3 au parlement et matraque dans la rue.
Police et justice sont mises à contribution pour réprimer et condamner celles et ceux qui luttent pour préserver leurs emplois et revendiquent le droit de pouvoir vivre dignement de leur travail ou de leur retraite.On recense actuellement près de 150 procès à l’encontre de militants de la Cgt. Du jamais vu !Tout heureux d’avoir un tel allié qui satisfait, par avance, son cahier de revendications, le patronat ne dit plus rien. Il peut, sans entraves, continuer à réaliser des profits…
Mais j’ajoute que, les mêmes causes produisant les mêmes effets, on assiste au même phénomène un peu partout en Europe.Évidemment, dans un tel contexte, c’est l’ensemble du mouvement syndical qui est durablement affaibli…
Avec quelles conséquences sociales et économiquespour le pays ?
François Thiéry Cherrier : On inscrit le pays dans une terrible spirale du bas coût. Moins cher, c’est encore trop cher… Une telle logique assèche toute l’économienationale tandis que les profits s’accumulentdans des bulles financières. Evidemment, cela se fait au détriment d’une redistribution plus équitable et solidaire des richesses produites en direction des comptes sociaux, de ce que l’on appelle aussi le socle social ainsi que du maintien et du développement des services publics.
L’ennemi de Hollande n’aura décidément pas été la finance ! Mais d’abord le peuple, les salariés et les retraités... C’est sous son quinquennat que les retraites ont été gelées et que l’on assiste à des régressions sociales considérables. Sous prétexte que tout cela coûterait trop cher, que l’on n’aurait plus les moyens ou qu’il faille s’aligner sur nos voisins… la protection sociale et les services publics sont devenus les seules variables d’ajustement des politiques publiques européennes.
À longueur de journées, on veut nous faire croire qu’il n’y a pas d’autres solutions que l’austérité. C’est un leurre ! Un jeu dramatique dont il ne faut pas être dupe.
Tu viens d’évoquer le gel des pensions de retraites, les retraités subissent-ils aussi les conséquences d’une telle stratégie ?
François Thiéry Cherrier : Bien sûr ! Le gel des pensions des régimes de base et complémentaires, engagé avec la réforme Balladur de 1993,amplifie la perte conséquente du pouvoir d’achat. Mais au-delà, les retraités subissent aussi les conséquences du recul de l’âge de départ. Ce n’est pas la même chose de bénéficier d’une retraite à taux plein à 60, 62 ou 63 ans qu’à 65,67 ou 70 ! Sans compter qu’en allongeant les annuités de travail, on augmente le chômage.
Sous les coups de butoir de la Commission européenne, le social est devenu la seule marge de manœuvre utilisée pour rester dans les critères. De fait, en matière de santé ou de dépendance, les restes à charge pour les personnes âgées ou leurs familles s’alourdissent. La casse des services publics de proximité (transports, hôpitaux, poste, culture…) accentue l’isolement et la perte d’autonomie. Il ne s’agit là que de quelques exemples. La régression pour les uns fait reculer tout le monde et c’est la pauvreté qui gagne du terrain.
Les retraités ont donc des revendications. Quoi de mieux qu’un syndicat pour les prendre en compte et les faire aboutir ?
François Thiéry Cherrier : Rien en effet. Le syndicat est le seul qui peut aider à élaborer les revendications et à créer le rapport de forces suffisant pour les porter. Il peut aussi sans doute permettre aux 15 millions de retraités de prendre conscience qu’ils constituent un corps social à part entière et qu’au-delà de leur grande diversité, ils ont des intérêts communs à défendre. D’abord là où ils vivent. Nous voulons que ce soient les retraités eux-mêmes qui expriment leurs revendications. C’est cela le sens du syndicalisme retraité de proximité que la Cgt veut développer.
Ainsi, nous proposons de faire circuler, sans attendre, des cahiers de revendications locaux sur les lieux de vie des retraités, en convergence avec l’UCR-CGT pour aider et coordonner ces initiatives.
Le 11e congrès de l’UCR se tiendra à Bordeaux. Comment s’annoncent ces assises ?
François Thiéry Cherrier : Nous serons à quelques semaines de l’élection présidentielle et dans la ville d’Alain Juppé. Il faudra, bien sûr, veiller à ce que ce congrès ne se transforme pas en tribune politique. N’en doutons pas, certains vont, dans cette période, regarder davantage les retraités, car ils votent !
Ce 11e congrès s’inscrit dans la continuité des deux précédents qui ont été marqués par d’importantes décisions. Je pense, bien sûr, à la mise en œuvre d’une démarche toujours plus attractive visant, à partir de la place et du rôle irremplaçable que jouent les retraités dans toute la société, àmontrer l’utilité du syndicalisme CGT, en direction de tous les retraités. Qu’ils aient ou non été syndiqués dans leur vie professionnelle. Je pense également au débat sur la place des retraités dans la Cgt, plus évidentedepuis le dernier congrès de la Confédération, en mars 2016 à Marseille.
Un syndiqué, une même voix dans la même Cgt. Tout cela doit maintenant entrer dans la vie. C’est tout le sens de notre 11ème congrès.
Propos recueillis par Michel Scheidt
La vie de Madeleine Riffaud est un hommage à la résistance sous toutes ses formes et en toutes circonstances. Le 2ème tome de ses mémoires en images est paru ! Editions Dupuis