Emmanuel Macron demande aux Français d’accepter de nouvelles privations et de faire confiance aux riches pour sortir du marasme. C’est ce que ses prédécesseurs ont fait avec les résultats que l’on sait. Il est pourtant un pays où l’austérité a été abandonnée, les salaires augmentés et le chômage comme la dette réduits. José Fort nous en parle…
Si on vous demande, tout de go, ce que vous inspire le Portugal que répondez-vous ? Les plus anciens évoqueront la dictature Salazar qui a plongé le pays pendant des décennies dans la nuit du fascisme. Les moins vieux, quand même plus très jeunes, se rappelleront les deux millions de Portugais partis travailler hors du pays pour fuir la pauvreté, les guerres coloniales et surtout la révolution des œillets.
Les encore sémillants, mais désolés pour eux, pas pour longtemps, évoqueront la modernisation du pays, le tourisme conquérant dans un pays où des retraités viennent rechercher la douceur du climat et les avantages fiscaux. Mais les plus jeunes ? Ils sauront peut-être que le chanteur Florent Pagny a préféré s’exiler fiscalement vers le Portugal pour ne pas payer ses impôts en France et placeront ce pays au même niveau que les autres en Europe. La mémoire, même récente, ça se travaille. Alors travaillons-là.
Le Portugal a durement été frappé par la crise en 2008 et a frôlé la faillite en 2011. A l’époque, la droite au pouvoir appliquant à la lettre les directives de la Commission européenne a pratiqué des années d’austérité à la schlague car, disait-on à Lisbonne, à Bruxelles, à Berlin et à Paris, point de salut sans s’attaquer aux salaires, aux retraites, aux services publics. Bref, la recette bien connue du tour de vis pour ceux qui en ont le moins. Avec un résultat calamiteux et un pays exsangue.
Voici qu’en 2015 arrive aux affaires une coalition de gauche composée du Parti socialiste, du Bloc de gauche, de communistes et d’écologistes. Une nouvelle ère pour ce pays qui va entamer un virage mettant fin à une politique d’austérité qui a eu pour conséquence une augmentation sans précédent du chômage avec des effets sociaux dévastateurs.
Aujourd’hui, le Portugal enregistre une croissance solide, un chômage en baisse s’élevant à 9% alors qu’il atteignait 17% il y a trois ans, une diminution de son déficit public et une augmentation du pouvoir d’achat. Un pied-de-nez aux directives de la Commission européenne. Comment ont fait ces Européens pas comme les autres?
La gauche arrivée aux affaires a misé sur une stimulation de la demande intérieure. Salaire minimum augmenté de 10%, retraites et allocations familiales revalorisées et interruption des privatisations de services et d’infrastructures publics. Les impôts ont diminué pour les plus modestes. Cette politique de relance a eu pour effet de nouvelles recettes fiscales.
Eric Dor n’a pas la réputation d’être un gauchiste échevelé. Ce directeur des études économiques à l’IESEG School of Management affirme, je le cite : « les mesures du gouvernement portugais ont rendu du pouvoir d’achat aux ménages. C’est cela qui a été le déterminent essentiel de la reprise et qui a produit une grande partie des créations récentes d’emploi même si l’embellie des exportations y a un peu contribué également. »
Je vous rassure. Je ne suis pas tombé dans une béatitude portugaise. Si la situation économique s’est considérablement améliorée au Portugal, le pays n’est pas devenu d’un coup d’un seul un eldorado fleurant l’extase. Mais le Portugal vient de démontrer qu’il est possible de faire autre chose que la politique d’austérité dictée par la Commission européenne. Depuis Lisbonne arrive une autre expérience, un autre message. Nous aurions tout intérêt à nous en inspirer.
José Fort
Lire aussi l'article du Huffington.post : "L'insolente croissance du Portugal inflige un camouflet au culte de l'austérité de Merkel et Bruxelles"
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