Il y a quelque indécence à assumer, comme si c’était une décision courageuse, une mesure qui va porter atteinte aux conditions de vie de près de 10 millions de retraités. C’est pourtant ce qu’a déclaré le président en se promenant dans les rues de Châlons-en-Champagne, le 1er mars. "Je sais que je demande un effort aux plus âgés, que parfois certains râlent, ça ne rend pas forcement populaire mais je l'assume".
Les mots sont pourtant choisis : la perte de pouvoir d’achat est plus séduisante lorsqu’on la travestie en « effort ». « Parfois » et « certains » sont là pour minimiser la colère qu’il sent monter dans le pays. Et si cela ne suffit pas : le mépris, comme chaque fois qu’il est en difficulté : les retraités ne protestent pas, ils « râlent ». Mauvais coucheurs ces retraités. Et chacun sait que les Français sont des râleurs. Donc leur mécontentement n’a pas d’importance. Non content de mépriser les réactions hostiles à sa mesure, il tente de tirer gloire de prendre une mesure qui « ne rend pas forcement populaire ». Il faudrait presque le féliciter !
Mais voilà, la vraie raison de son coup de menton c’est que sa mesure ne passe pas chez les retraités. Selon un sondage publié le 3 mars, 71% des Français considèrent qu’il est injuste de surtaxer les retraités, par une augmentation de la CSG, pour « redonner du pouvoir d’achat aux salariés du privé et aux indépendants ».
Toujours selon ce sondage 12% seulement considèrent que les mesures décidées par Emmanuel Macron et le gouvernement d’Edouard Philippe « améliorent globalement le pouvoir d’achat des Français ». La tentative de faire taire les retraités au nom de la solidarité avec les actifs n’a convaincu ni les retraités ni les actifs.
Non pas que les retraités soient des râleurs professionnels, Monsieur le président, mais cela fait des années qu’ils font des efforts ! Leurs pensions sont bloquées depuis 5 ans et le seront encore en 2018, à l’exception de deux augmentations dérisoires de 0,1 % et 0,8 %, la veille de la hausse de la CSG…
Expliquer à la Nation via des médias bien dociles, que les retraités sont des privilégiés, cacher que la hausse de la CSG s’appliquerait non pas à la pension mais au revenu fiscal de référence, qu’elle serait calculée non pas sur le net mais sur la pension brute.
« Les retraités d'aujourd'hui font partie d'une génération dorée ! », assure Eric Alauzet, député macronien du Doubs, dans le Parisien du 5 mars. Et il en rajoute : « Et s’ils ont travaillé toute leur vie, ça ne suffit pas comme argument au moment où il faut trouver de l’argent pour renflouer les caisses de l’Etat », dit-il. Le chantage au déficit et à la dette. Parlons-en.
Où trouver l’argent ? Selon Le Figaro du lundi 5 mars "sur les 39 entreprises du CAC 40 qui ont dévoilé leurs comptes, 31 affichent des résultats en hausse" et annoncent des bénéfices record pour 2017. Ces entreprises avaient largement les moyens d’augmenter les salaires de leurs ouvriers et employés. Emmanuel Macron a préféré réduire les cotisations sociales, mettant en danger le financement de la Sécurité sociale, et les compenser par la hausse de la CSG
Mais direz-vous il veut favoriser l’investissement. Le problème c’est que la France est le pays en Europe qui distribue le plus de dividendes, 45 milliards en 2017, alors que l’Allemagne en a distribué 34. Les bénéfices de l’activité de millions de salariés ne nourrissent pas l’activité de nos entreprises, elles enrichissent les déjà très, trop riches.
Prenons Bernard Arnault. En 2017 il a gagné 66 millions 575 mille 342 euros par jour. Près de 3 millions d’euros par heure. Au total pour l’année 24,3 milliards. Non pas d’effort pour lui, au contraire, à lui comme à d’autres milliardaires il leur a offert de ne plus payer d’impôt sur la fortune. Bernard Arnault dont la fortune s’élève à 49,6 milliards en 2017 n’aura pas à payer l’impôt sur la fortune en dehors de sa fortune immobilière. Emmanuel Macron en supprimant l'ISF a fait cadeau à Bernard Arnault de 552 millions d'euros ! Au titre de la solidarité inter-financiers ?
Le problème pour Emmanuel Macron et son gouvernement c’est que la politique qu’ils mènent en faveur des plus riches est de plus en plus visible. Il n’a pas été élu par les retraités ni les moins aisés mais par les plus riches qui ont mis leur puissance financière au service de l’élection d’un président qui leur est acquis.
Le 15 mars c’est l’expression de ces millions de retraités qui sera représentée dans les villes de France. A l’appel de neuf organisations de retraités nous dirons non et non à la hausse de la CSG et oui, nous voulons la revalorisation de nos pensions. Et nous serons nombreux !
Pascal Santoni
La vie de Madeleine Riffaud est un hommage à la résistance sous toutes ses formes et en toutes circonstances. Le 2ème tome de ses mémoires en images est paru ! Editions Dupuis